Le 13 septembre 2022
Collectif
Depuis la prise de pouvoir des talibans en août 2021, 41 millions d’Afghans subissent une catastrophe humanitaire majeure. Un collectif de personnalités du monde associatif et syndical, des médias et de la culture, parmi lesquelles Ariane Mnouchkine, Patrick Baudouin ou Céline Parisot réitèrent, dans une tribune au « Monde », leur soutien aux populations prises dans cet engrenage de terreur.
Il y a vingt et un ans, le 11 septembre 2001, les Etats-Unis subissaient des attaques terroristes de grande ampleur. Deux mois plus tard, le régime des talibans, au pouvoir en Afghanistan depuis cinq ans, prenait fin. Il est désormais de retour.
Cela fait un peu plus d’un an déjà que les talibans règnent de nouveau sur l’Afghanistan en fondant tout le système légal, social et juridique du pays sur des règles religieuses. Depuis leur prise de pouvoir, quarante et un millions de personnes, soit presque l’équivalent des deux tiers de la population française, subissent une catastrophe humanitaire majeure.
Les premières victimes de cette nouvelle organisation de la société sont les femmes, privées de leurs droits fondamentaux, forcées à la soumission dans les cadres personnel et professionnel, touchées de plein fouet par une répression dramatique. Défenseurs des droits humains, journalistes, artistes, magistrats, avocats, toutes celles et tous ceux qui rejettent ce régime subissent aussi des persécutions quotidiennes. Tous et toutes craignent pour leur vie et celle de leurs proches.
Alors ils se terrent et, quand ils le peuvent, ils fuient. Celles et ceux qui sont arrivés à obtenir un visa et une autorisation de relocalisation en Europe sont souvent bloqués au moment de quitter le pays. Celles et ceux qui, au prix de mille difficultés, sont parvenus à se réfugier dans un Etat voisin demeurent en transit dans ces pays limitrophes durant de longs mois et ne peuvent pas rejoindre la France.
« Nous avions beaucoup de projets pour le peuple afghan. Tout a été ruiné en une semaine avec l’arrivée des talibans : ils ne respectent ni les droits de l’homme, ni les droits des femmes. » Ainsi s’alarmait, déjà en 2021, le bâtonnier de Kaboul. « Je demande encore une fois (…) à la communauté internationale de nous aider. Il faut agir très vite. » Cet appel au secours ne peut pas, ne doit pas nous laisser indifférents.
Face à ce désastre, de nombreuses organisations sont mobilisées pour porter secours aux Afghans et aux Afghanes persécutés. Chacun doit prendre conscience de l’effort international nécessaire et des responsabilités qui en découlent. Un an après la chute de Kaboul, le 15 août 2021, et le départ des troupes américaines, l’actualité nous rappelle au quotidien le sort que subit ce pays depuis l’arrivée au pouvoir des talibans.
Face à ce drame humain, nous, organisations et personnalités en lien avec les Afghans, exprimons notre forte inquiétude quant à l’évolution de la situation en Afghanistan et restons mobilisées contre les atteintes aux droits humains et l’oppression systématique des femmes, pour défendre les valeurs fondamentales de la dignité humaine et pour obtenir l’asile politique pour tous les Afghans qui font l’objet de persécutions.
La lutte pour le respect des droits fondamentaux doit continuer. Nos efforts en ce domaine doivent rester constants. Nous appelons instamment les gouvernements européens, et le gouvernement français en particulier, à renforcer leur mobilisation pour faciliter la mise à l’abri des citoyens afghans les plus exposés à l’oppression des talibans.
Siddiq Barmak, réalisateur afghan ; Anthony Bellanger, secrétaire général de la Fédération internationale des journalistes (FIJ) ; Patrick Baudouin, président de La ligue des droits de l’homme (LDH) ; Nordine Drici, président de Planète Réfugiés-Droits de l’Homme ; Philippe Dupourqué, président du Groupe accueil et solidarité (GAS) ; Jérôme Gavaudan, président du Conseil national des barreaux (CNB) ; Shoukria Haidar, présidente de Negar-Soutien aux femmes d’Afghanistan ; Samra Lambert, secrétaire nationale du Syndicat de la magistrature ; Ariane Mnouchkine, metteure en scène et directrice du Théâtre du Soleil ; Emmanuel Poupard, premier secrétaire général du Syndicat national des journalistes (SNJ) ; Céline Parisot, présidente de l’Union syndicale des magistrats (USM) ; Flor Tercero, présidente de l’association Avocats pour la défense des droits des étrangers (ADDE) ; Maher Tekaya, secrétaire confédéral de la CFDT ; Laurent Villette, secrétaire général de la CFDT-Journalistes ; Michèle Vitrac, présidente d’ECVF-Elu.e.s contre les violences faites aux femmes.
Tribune parue dans LeMonde.fr