du 03 au 14 avril 2019
Texte et conception : Rainer Sievert
Mise en scène : Lionel Parlier
Avec : Rainer Sievert, Manuel Langevin, Wilfried Schick
Musique : Manuel Langevin | Lumière et scénographie : Wilfried Schick | Régie son : Alistaire Beaufils | Collaboration texte : Valérie Moinet | Dramaturgie : Marc Wels
16 € (individuels)
12 € (collectivités, demandeurs d'emploi)
10 € (étudiants – de 26 ans)
C'est l'histoire d'un pillage d'usine : un fond d'investissement acquiert une entreprise pour un euro symbolique, n'investit pas un seul dollar et réussit à siphonner les actifs.
Mais comment ça marche ?
Je suis arrivé dans cet endroit par hasard. En déplacement. En tournée. Nouzonville. Une ville de six mille habitants, adossée au canal de la Meuse. L'ancienne capitale du « royaume du fer ». J'avais bien vu qu'il y avait des bâtiments abandonnés, on ne peut pas les rater, ils sont au milieu de la ville. Au début je pensais qu'ils étaient abandonnés depuis une vingtaine d'années au moins, mais mon étonnement fut grand quand j'ai posé les premières questions, cela ne faisait que six ans que l'usine avait été fermée. Comme un candide, je passais de question en question, et en quelques heures, j'ai rencontré plusieurs personnes qui avaient envie de raconter. De nouvelles portes s'ouvraient à chaque histoire, et derrière chaque anecdote se trouvait le destin de quelqu'un.
En 2004, après des problèmes de trésorerie, l'entreprise emblèmatique de cette ville, leader mondial d'un produit pour l'industrie automobile, a été confiée à un fond d'investissement américain. On pensait alors qu'on allait pouvoir se brancher sur le flux économique inépuisable de la mondialisation. Aujourd'hui il n'en reste que des ruines. Comment est-ce possible ?
Je me suis rendu compte que je n'y connaissais absolument rien !
Alors je me suis plutôt concentré sur les mécanismes de décisions soi-disant rationnelles et inévitables, qui ont entraîné la chute de cette entreprise.
Ce qui m'intéresse particulièrement dans cette histoire est le fait qu'elle se déroule aujourd'hui.
Elle me semble significative pour notre époque, pour ce chamboulement qui se produit imperceptiblement depuis la chute du mur de Berlin.
Il est vrai que c'est toujours compliqué de travailler sur (ou avec) l'Histoire récente. Il est compliqué de trouver de la distance pour transformer théâtralement l'Histoire dans laquelle nous nous trouvons. Nous avons les pieds dedans, nous pouvons nous tromper, nous engluer....
C'est notre histoire ! C'est notre monde ! Et là, nous prenons un exemple et nous le disséquons.
Le Théâtre peut, non, doit accompagner ces changements de société.
Déjà simplement pour dire : ça ne va (peut-être) pas de soi.
Ce qui est arrivé à Nouzonville est une dérive particulièrement odieuse de la mondialisation. Il est important de l'expliquer, de mettre des mots dessus. Il est bon d'étaler ces procédés sur une scène de théâtre, très proche du public. Et joyeusement s'il vous plaît, comme un cabaret sur « l'économisme », comme un conte moderne, comme un documentaire acerbe, absurde, drôle et poétique. Avec de la musique en live. Avec la machinerie théâtrale.
La plupart d'entre nous ne savons pas comment fonctionne la Bourse. Nous ne savons pas vraiment ce que les subprimes ont a faire avec nos crédits personnels etc. etc. etc., et nous nous retrouvons avec des discours sur « la crise » complètement disparates, ce qui nourrit les angoisses, ce qui nourrit la sensation que chacun doit s'en sortir tout seul, comme il peut. Chacun pour soi.
Le Théâtre a plus que jamais la fonction d'un point de ralliement, d'un lieu solidaire, et il me semble que l'acteur a aussi la fonction de faire passer des informations de village en village...
Il est important de témoigner de ces luttes aujourd'hui, parce que c'est une lutte pour l'humain et pour notre futur. L'esclavage économique d'une grande partie de l'humanité n'est pas une fatalité...comme on veut nous le faire croire.
Comme disait Bertolt Brecht : « Nos défaites ne prouvent rien. »
Rainer Sievert