« Et Gengis Khan ne savait que bander son arc contre les aigles »
Mao Tse Toung
L’ASSOCIATION THÉÂTRALE DES ÉTUDIANTS DE PARIS
présente
GENGIS KHAN
de
HENRY BAUCHAU
ARÈNES DE LUTÈCE – 1961
Président d’Honneur : ROGER PLANCHON
Présidente : ARIANE MNOUCHKINE
Vice-Président : JEAN-CLAUDE PENCHENAT
Administrateur : DOMINIQUE HENRY
Secrétaire générale : FRANCE DIJOUD
Public-Relations : MARTINE FRANCK
En octobre 1959 se fondait l’Association Théâtrale des Étudiants de Paris. Formée par des étudiants des origines les plus diverses, elle tente de donner un caractère nouveau au théâtre universitaire français. Il ne s’agira plus d’un groupe d’école ou particulier à une discipline : l’étudiant en médecine y côtoie ses camarades des Beaux-Arts, des sciences politiques ; le futur professeur d’éducation physique y travaille avec les étudiants de l’École du Louvre, des Facultés des lettres et des sciences…
Un grand nombre de nationalités est représenté dans les diverses activités de l’Association : Suède et Guatémala, Yougoslaves et Martiniquais, Égypte, Canada et Australie, contribuent à donner à l’Association le caractère d’universalité qu’elle cherchait.
Universalité également dans ses réalisations : permettre à ses membres non seulement de réaliser un spectacle, mais aussi de participer à toutes les disciplines du théâtre. Aux cours du soir d’art dramatique et de scénographie, aux conférences données par quelques-unes des personnalités les plus compétentes du théâtre contemporain, Jean-Paul Sartre, Sacha Pitoëff, André Travert, les étudiants peuvent trouver une réponse à leur curiosité d’anciens spectateurs.
« Lequel a plus de valeur : Gengis Khan traînant à sa suite toutes les hordes de l’Asie ou Monsieur de Turenne sur le Rhin à la tête de 80 000 hommes ? »
SAINTE-BEUVE.
Que peut-on savoir des réactions d’un Mongol du XIIIe siècle ? Aussi n’est-ce pas dans les pages d’un livre ou sur la prière des tombeaux que j’ai rencontré Gengis Khan, mais là où, quittant l’histoire pour le mythe, certains visages pénètrent dans le patrimoine de nos rêves, de nos frayeurs et de nos désirs.
L’homme présent, dans sa puissance accrue, porte une ombre très forte. Cette ombre fait peur. Pour la fuir toute l’attention se porte sur la part humanisée de la personnalité. Là l’esprit, régnant avec plus ou moins de bonheur sur le tumulte primitif, se compose un visage de durée et de mesure. C’est l’univers que j’aimais d’un amour exclusif, celui que j’appellerai ici la Chine intérieure.
Cette Chine spirituelle protégée par sa grande muraille, exclut l’ombre et le Barbare et prétend ne vivre que dans la lumière.
Si l’ombre paraît, elle exige plus de lumière, toujours plus de lumière et la paie par l’angoisse. Pour peu qu’une crise survienne, l’économie de l’angoisse s’effondre et la Chine, stupéfaite, entend s’agiter en elle la voix profonde. Cette voix, qui semble venir à la fois des étendues les plus reculées et du centre le plus intime, domine le bruit des eaux et celui des cités, elle parle, elle se nomme : « Comme il n’y a qu’un Dieu dans le ciel, il n’y a qu’un maître de la terre et c’est moi, Gengis Khan ».
J’étais prêt à secourir mon frère inférieur, à aider la part sous développée de moi-même et du monde à accéder à la lumière. Au moment où ma pitié s’éveille, le Barbare refuse mes dons, se rit de ma supériorité et prétend diriger la terre.
Qu’apporte-t-il à l’appui de cette volonté monstrueuse ? Gengis Khan ne veut pas s’emparer de la Chine pour en jouir, son bonheur ne combat pas les nôtres, il les ignore. Pour lui la Chine, la Chine de notre enfance et du premier amour, n’est qu’un obstacle, un frein à l’ambition de l’espace. En face des civilisations, précieuses mais fragmentées, il élève le projet nomade, le plus vaste qu’un homme ait encore conçu : un seul peuple, une seule steppe sur toute la terre. Les désirs du Barbare sont insensés. Pourtant je dois reconnaître que, dans un joint secret, dans quelque faille de la muraille, Gengis Khan, cette face aveugle, cette immense matière… me fascine.
L’intensité de son action, les cris de son sommeil, tout ne révèle-t-il pas qu’il porte en lui ce feu ardent et sombre dont l’absence affadit notre lumière ? Mais il y a en nous une telle habitude d’assimiler l’ombre et l’obscurité au mal, un tel préjugé de la clarté que je résiste. Je crois pouvoir arrêter Gengis Khan en lui refusant la parole. Je n’assumerai pas cette image du meurtre et, pour l’oublier je me réfugie dans les ruines où dorment les précieuses poussières du monde : « Préférer, dit le Zen, ce que vous aimez à ce que vous n’aimez pas, telle est la maladie de l’esprit… »
Finalement Gengis Khan se saisit de la parole. C’est une violence, un déchirement de la part la plus serrée de l’être, bonheur et malheur mêlés, comment dire, sous le signe du scorpion. Tout est écarté d’un mouvement d’épaule, ce n’est plus à moi de choisir. Gengis Khan sait avec René Char « que la vérité est noble et que l’image qui la révèle c’est la tragédie ». Il parlera au théâtre. J’ai peur, j’ignore tout du théâtre, qu’importe au Mongol. Encore chargé du carcan ou je prétendais le retenir, il plonge dans les eaux inconnues et il en ressort ruisselant.
H. B.
Timour : Armel Marin
Temoudjin : Jean-Frédéric Brossard
Kassar : Pierre Juliano
Djèbé : Yves Elliot
Gengis Khan : Jacques Torrens
Oloune : Solange Royez
Balougha : Pierre Garin
Soubotai : Philippe Léotard
Chigour : Alain Zaresgradsky
Teb Tengri : Gérard Hardy
Tchelou-Tsai : Pierre Garin
Le Roi D’Or : Jean Ricard
Le vieillard : Henri Melon
L’archer : Philippe Léotard
Ogodai : Francis Rousset
Djélal : Farouk el Demer-Dash
Akim : André Sirois
Choulane : Anne Zitouni ou Janine Demeyer
Khien : Jean Ricard
Ahmed : Henri Melon
La Sultane : Solange Royez
Messager flèche : Alain Zaresgradsky
Nicola Polo : Dominique Henry
Koubilaï : Jean-Frédéric Brossard
Tangout : Gérard Hardy
Gardes Mongols :
Alain Zaresgradsky, Michel Barda, Gordon Halperm, Paul Baert, Baudoin Bauchau, Jean-Michel Bousquet, Florentin Roche, Jean-Frédéric Brossard, Karim
Foules chinoise et perse :
Frances Ashley, Paul Baert, Jean-Michel Bousquet, Janine Demeyer, Anne-Marie Ferrieux, Gordon Halperm, Gérard Hamelat, Gérard Hardy, Dominique Henry, Elizabeth Monod, Elizabeth Pons, André Sirois, Marie-Andrée Thomas, Alain Zaresgradsky, Georges Donzenac, Myrrha Donzenac, Ginny Rust, Pat Ryan
Administration : Jean-Claude PENCHENAT, Dominique HENRY
Régie : Chritian HAVRET, assisté par Georges ERNOULT, J.C. PENCHENAT, Alain ZARESGRADSCKY, Frances AHSLEY
Secrétariat général : Frances ASHLEY
Publicité : Martine FRANCK, Alain MATHERON
Mise en scène : Ariane MNOUCHKINE
Costumes : Françoises TOURNAFOND, assistée pour la réalisation par : Janine DEMEYER, Anne-Marie FERRIEUX, Martine FRANCK, Frances ASHLEY, Georges ERNOULT, Elisabeth PONS
Dispositif scénique : J.-B. MAISTRE
Musique de LASRY et BASCHET
Masques : Monique GODARD, assistée par Gérard HARDY
Accessoires : Dominique GENTY, assistée par : Paul BAERT, Alain ZARESGRADSKY, André SIROIS, Georges ERNOULT, Maurice FILLIATRE, Martine FRANCK
LES ENFANTS DES ARÈNES DE LUTÈCE
Les tissus ont été gracieusement fournis par la maison BOUCHARA.
Le dispositif scénique a été exécuté par l’entreprise Jean MARTIN.
La sonorisation a été assurée par M. Georges GRANDVOINNET.
remercie :
Mme. P. SCHTERBININE
M. Louis FRANCK
M. Pierre MOINOT
M. Charles ELGOSY
M. Olivier BURGELIN
Mme Gisèle FRIOUX
Mlle Micheline GRAS
Mme Janine RUAULT
M. C. EYRAUD
M. J.-P. SARTRE
M. J.-B. MAISTRE
M. Jacques DERLON
M. AUGER
Mlle Marie SENAC
M. Paul PERSON
STUDIOS YVETTE MORIN
Mme Paulette COQUATRIX
M. Jean MAUDUIT
M. F. SULZER
MAISON BOUCHARA
Mlle Monique GODARD
M. CHABERT
M. J.-M. BOEGLIN
Mme Blanche MONTEL
M. Raoul LEVY
M. René TOUILLAUT
Mme CHAINTRE
M. F. CRISTALDI
M. A.-M JULLIEN
M. André LEOTARD
Mme VENET
Mme P. PHELOUZAT
ETABLISSEMENTS SYMO
M. Oscar DANCIGER
M. Jean DARCANTE
M. J.-P. MIQUEL
IMPRIMERIE MALET
QUI, PAR LEURS CONSEILS, LEUR APPUI ET LEUR AIDE, ONT PERMIS LA CRÉATION DE L’A. T. E. P. ET LA RÉALISATION DE CE SPECTACLE